Jacinthe Côté

Jacinthe Côté
Doctorat en biologie, 2011
Directrice principale, Innovation et R&D, Farinart

Jacinthe Côté

« J’ai remarqué que ça avait augmenté la valeur des mots qui sortaient de ma bouche. En fin de compte, le doctorat m’a permis de faire plein de choses qui n’étaient pas sur ma voie initiale. » 

La science et ses applications tissent le fil conducteur de la carrière de Jacinthe Côté, qui a déjà pris quelques embranchements, de la nutrition à la communication, puis à l’industrie agroalimentaire. Alors qu’elle était sur le marché du travail depuis plus d’une décennie après ses études de maitrise, c’est la quête des propriétés antimicrobiennes de la canneberge qui l’ont amenée à participer à des recherches qui lui ont permis de décrocher un doctorat en biologie à l’INRS.

Mme Côté a d’abord complété une formation pour devenir nutritionniste à l’Université McGill et elle a pratiqué la profession à temps partiel alors qu’elle entreprenait une maitrise en sciences et technologies agroalimentaires. « Je trouvais qu’il manquait un volet de chimie analytique à ma formation », se souvient-elle. « Les effets de la transformation sur la valeur nutritive et les propriétés des aliments n’étaient pas suffisamment approfondis dans le programme de nutrition », constatait-elle. Bien qu’elle ait apprécié ses études de maitrise et que son directeur de mémoire lui ait proposé le passage accéléré au doctorat, elle a décliné l’offre. « J’avais hâte de diplômer parce que j’étais très attirée par le marché du travail. Je considérais des possibilités en santé publique ou en industrie. J’ai choisi la deuxième et c’est ce qui a défini le cours de ma carrière », estime-t-elle.

En parallèle, alors qu’elle étudiait à la maîtrise, elle a commencé à publier une chronique dans les quotidiens du groupe Gesca à travers le Québec (La Presse, Le Soleil, Le Droit, Le Nouvelliste, etc.). Ses billets sur les enjeux de nutrition, la transformation alimentaire et la valeur nutritive des aliments y ont paru pendant une douzaine d’années. « J’ai toujours beaucoup aimé cet aspect communicationnel de la science. Pour moi, ça allait de soi de partager mes connaissances dans des conférences, des entrevues et des chroniques dans les médias », dit-elle.

Après un premier passage chez Lallemand, c’est alors qu’elle travaillait en soutien technique et en R-D au développement de produits industriels à base de canneberge chez le transformateur Canneberges Atoka (aujourd’hui Ocean Spray) qu’elle a rencontré la professeure Monique Lacroix, spécialiste des sciences appliquées à l’alimentation, dans une conférence.

« En bref, l’entreprise cherchait à développer un concentré de jus de canneberge ayant un meilleur profil arômatique. En même temps, il y avait un intérêt à isoler des fractions de canneberge afin d’étudier les effets du procédé sur les propriétés antimicrobiennes du jus», résume-t-elle. Alors que les services du laboratoire de Pre Lacroix ont été retenus pour faire l’étude, Mme Côté s’est retrouvée « à côtoyer beaucoup d’étudiants de l’INRS et embarquée moi-même dans une occasion d’études doctorales dans le cadre de mon travail. Ça été une belle collaboration de recherche universitaire et industrielle et, en prime, j’ai obtenu un diplôme et j’ai eu la chance de rencontrer des chercheurs avec lesquels je demeure en contact », souligne-t-elle avec humour.

Elle garde une impression très positive de ses interactions avec la communauté du Centre Armand-Frappier Santé Biotechnologie, bien qu’elle n’ait pas passé beaucoup de temps sur le campus de Laval étant donné qu’elle effectuait une partie de ses travaux de recherche au laboratoire de son entreprise située dans le Centre-du-Québec. Elle a également eu l’occasion de côtoyer des membres de la communauté étudiante et scientifique du Centre Eau Terre Environnement dans le cadre de son travail en transformation alimentaire. « J’ai rencontré à l’INRS des gens allumés, passionnés et axés sur la pertinence de leurs travaux de recherche », retient-elle.

Elle affirme que son diplôme doctoral lui a conféré un important sceau de crédibilité : « J’ai remarqué que ça avait augmenté la valeur des mots qui sortaient de ma bouche. J’ai vu que ça commande le respect en recherche et développement et que mon employeur y accordait beaucoup d’importance », dit-elle à propos de Lallemand Boulangerie, dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, où elle a notamment été directrice de gestion de produits.

Avec le recul, elle retient qu’il ne faut pas hésiter à retourner aux études. Elle conseille toutefois aux femmes de poursuivre leurs études le plus possible avant d’avoir des enfants, compte tenu des difficultés de faire des études alors qu’on a des personnes à charges. « Finissez vos études, après vous pourrez envisager un congé, planifier un voyage, fonder une famille… », recommande-t-elle. Bien que plus jeune elle n’avait pas senti le désir de faire des études doctorales qu’elle associait à une carrière universitaire, elle est fière d’avoir gardé l’esprit ouvert, d’être retournée aux études et d’avoir complété sa thèse doctorale alors que sa fille avait moins d’un an.

Elle encourage aussi les étudiantes et étudiants à se doter d’une formation variée en sciences et même de compléter avec des études en gestion afin d’avoir « un plus grand éventail de connaissances et s’ouvrir des possibilités de carrière encore plus vastes », dit-elle. Elle ajoute que les études doctorales sont « une occasion de développer diverses compétences : de la gestion de projets à la rédaction et à l’édition, en passant par la gestion de personnel, les communications et les demandes de subvention. En fin de compte, le doctorat m’a permis de faire plein de choses qui n’étaient pas sur ma voie initiale », résume-t-elle.

Après s’être brièvement éloignée du domaine de la recherche appliquée en travaillant au Cabinet de relations publiques National, elle est maintenant de retour en industrie, à titre de Directrice principale, innovation et R&D, chez Farinart, un producteur de mélanges de grains et de farines. Elle dit toujours s’appuyer sur la science dans son travail. « Les faits, les données vérifiables, c’est essentiel », affirme-t-elle. « Entreprendre une conversation avec des émotions ou des éléments subjectifs, c’est une recette pour que ça dérape », ajoute-t-elle. « S’appuyer sur les faits plutôt que sur des perceptions, c’est ce qui ouvre la possibilité d’un dialogue et des échanges constructifs. C’est la base des relations et des rapports humains. C’est l’approche que j’utilise, tant pour les entreprises que les consommateurs », conclut-elle.

[Propos recueillis en novembre 2023.]

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