Myriam Richard
Maîtrise en études urbaines (2012)
Professeure, Département de psychoéducation et travail social, Université du Québec à Trois-Rivières
« Ça a forgé une conception de la recherche qui m’habite encore aujourd’hui : une recherche appliquée, multidisciplinaire, connectée au terrain et profondément humaine. »
Pour Myriam Richard, son arrivée à l’INRS tient d’une heureuse coïncidence. Après un séjour d’un an en Russie dans le cadre d’un échange universitaire, elle découvre le mémoire d’une étudiante dirigée par Annick Germain à l’INRS sur la communauté russophone à Montréal. D’abord formée en histoire et cherchant à aborder les enjeux d’immigration dans une perspective plus contemporaine, elle contacte la professeure, qui accepte de superviser son projet. Elle intègre en même temps le Chantier des histoires régionales comme assistante de recherche. Dès son arrivée, Myriam se retrouve ainsi à la fois étudiante et collaboratrice dans un projet collectif – une double posture qu’elle aura l’occasion d’explorer à plusieurs reprises dans son parcours.
Son mémoire de maîtrise, consacré aux représentations de la géographie résidentielle des immigrants d’ex-URSS à Montréal, s’intéresse aux échanges sur un forum internet où la communauté partageait ses conseils sur le logement et les quartiers de la ville. Ce projet lui permet de combiner ses intérêts pour l’immigration, le logement et la Russie, tout en développant un regard plus large sur les dynamiques urbaines. Sa participation au projet « La cohabitation interethnique dans les quartiers de classe moyenne à Montréal » dirigé par Annick Germain constitue quant à elle un jalon de sa formation pratique à la recherche en études urbaines.
Ce qui marque le plus Myriam de son expérience à l’INRS, c’est la proximité et la richesse de l’écosystème de recherche. « Ça a été hyper formateur, tant sur le plan intellectuel qu’humain. On apprenait la recherche en la faisant, dans un contexte appliqué, en lien direct avec le terrain et les politiques publiques. » Elle garde un souvenir particulièrement vif du travail collectif mené avec d’autres membres de la communauté étudiante et scientifique, dans un environnement stimulant, doté d’espaces professionnels où elle pouvait rédiger et échanger. « Faire de la recherche ensemble, ça rapproche, » dit-elle.
Après sa maîtrise, Myriam poursuit d’abord sa collaboration avec Annick Germain, mais sent le besoin de se rapprocher du terrain. Grâce au réseau de sa directrice, elle s’implique dans une table de concertation dédiée à l’accueil et à l’intégration des nouveaux arrivants. Cette expérience déclenche une véritable réorientation professionnelle. Elle comprend que ce qui l’intéresse, au-delà des contextes urbains et historiques, ce sont les personnes et leurs trajectoires de vie. Elle se tourne donc vers le travail social, domaine dans lequel elle complète une nouvelle maîtrise puis un doctorat.
Ses recherches portent alors sur les parcours des personnes réfugiées, en particulier les impacts des migrations sur les dynamiques familiales. Elle mène des études de terrain au Québec et au Liban, contribue à l’élaboration d’outils d’intervention pour soutenir les parents immigrants et s’intéresse de près aux enjeux de genre et aux vulnérabilités spécifiques des familles réfugiées. Elle réalise une thèse sur les expériences de séparation et de réunification familiale de personnes réfugiées en mobilisant des perspectives transnationales et un point de vue critique sur les pratiques d’intervention. Un postdoctorat en administration publique la conduit ensuite à travailler sur un processus de cocréation de l’adaptation des services avec des jeunes issus des communautés immigrantes, réfugiées et racisées.
Aujourd’hui professeure à l’Université du Québec à Trois-Rivières, elle enseigne les méthodologies d’intervention de groupe et souhaite approfondir ses recherches sur les migrations, la diversité familiale et l’intervention sociale. Elle garde de l’INRS une conception profondément concrète de la recherche : « Ça a forgé une conception de la recherche qui m’habite encore aujourd’hui : une recherche appliquée, multidisciplinaire, connectée au terrain et profondément humaine, » résume-t-elle.
Son conseil aux étudiant·e·s actuel·le·s est simple : saisir toutes les occasions offertes par l’INRS. « Profitez de la proximité avec les scientifiques et des échanges avec des collègues venus d’horizons variés. Écoutez ce que chacun apporte, explorez, et tirez profit de la multidisciplinarité. »
Quant à ses souhaits pour l’avenir, ils traduisent son engagement envers la société : « Dans un contexte de polarisation et de fragilisation du tissu social, je souhaite que la recherche continue d’être entendue et utile, qu’elle garde un impact concret et qu’on respecte la démarche scientifique ».
[Propos recueillis en septembre 2025.]